samedi 6 janvier 2024

6 janvier - Aujourd’hui que deviendra cet enfant plus tard ?

Parfois, comme tous les parents, je me demande ce que seront, ce que feront mes enfants plus tard. J'essaye (parfois en vain, on va pas se mentir) d'éviter de trop jouer au jeu des prédictions. D'abord parce que c'est un coup à se planter, et j'aime pas avoir tort :) Et d'autre part parce que c'est aussi un coup à les influencer, et ce serait vraiment nul. Quand je me risque à faire des prédictions (pas devant eux), je vais, cependant, rarement au delà de l'adolescence. J'ai pensé hier, par exemple, qu'entre sa petite tête de bois, son sourire coquinou et sa fréquente flemme aiguë, il allait falloir garder un œil sur l'Étourneau au sortir de l'enfance, et qu'on risquait d'en baver un peu.

Parfois, aussi, je pense à leur avenir sous un angle plus angoissé. Je ne manque pas de raisons, ces temps-ci, de me demander dans quel monde grandiront mes enfants. Comment ils y grandiront, la place qu'on leur y laissera. Ce qu'ils pourront se permettre de devenir.

Peut-être qu'au fond, une bonne petite tête de bois bien solide, une volonté à toute épreuve, pour résister, surmonter tout ce qui va se trouver sur leur chemin, c'est le mieux à leur souhaiter, même si pour l'instant, ça m'agace parfois en tant que mère au bout de sa vie...

D'ici là, il faut travailler à les équiper pour pleins de futurs possibles (quelle responsabilité!) sans perdre de vue que ce n'est pas de moi que dépend l'intégralité de leur bien-être futur (quelle anxiété!).

Bon. Va te coucher, on verra bien demain où on sera.

mardi 24 octobre 2023

Petit à petit, les petits piafs font leurs nids

Cette nuit, l'Étourneau dort pour la première fois dans sa nouvelle chambre (l'ancienne salle de jeu).

Depuis hier, on bouge des meubles, on trie des jouets. Hier, les enfants se sont partagés, sans conflits, les jeux de société. Aujourd'hui, ils ont attaqué le contenu de plusieurs caisses de jouets. Ça se passe beaucoup mieux que ce que j'anticipais (bon, enfin c'est le bordel, quand même).

Si on excepte ses premiers mois où l'Étourneau dormait dans notre chambre, et les très rares fois où on a dû exfiltrer l'un des deux, malade, de la chambre pour aller dormir ailleurs avec lui ou elle), mes enfants n'ont quasiment jamais dormi séparément. Bizarrement, c'est le Moineau qui avait le plus besoin de cette chambre commune, qui disait le plus avoir peur de dormir seule. Ces temps-ci, c'est elle qui a été à l'origine de la migration du petit vers l'autre pièce. Depuis des semaines, elle manifeste son impatience quand il la suit partout, revendique qu'elle veut jouer seule dans sa chambre, sans lui. Mais ce soir encore, au moment de se coucher, elle avait peur de dormir seule. Elle veut être seule le jour, mais pas la nuit (et en fait, même le jour, elle n'aime pas beaucoup être seule à l'étage, et préfère que son frère soit quand même juste à l'autre bout du couloir, pas trop loin.)

J'ai suggéré qu'ils fassent un pacte de courage avant d'aller au lit. À vrai dire, le petit avait l'air très content de rejoindre son lit dans sa nouvelle chambre. Quand je lui ai souhaité bonne nuit à travers la porte avant de descendre, il ne m'a même pas répondu. Et peut-être que je me fais des idées, mais il me semble qu'il a fait beaucoup d'efforts toute la journée pour être particulièrement autonome et grand sur plein de trucs.

Je m'attendais à être rappelée par l'une ou l'autre (surtout l'une), mais au bout de trois heures, rien. On verra si ça tient la nuit...

Mes petits oiseaux dans deux nids séparés. Encore une étape franchie.

mardi 5 mai 2020

Ribambelle d'amis

Le Moineau a des amis imaginaires depuis un peu plus d'un an. La première est apparue pendant mon deuxième mois de grossesse, environ 3 semaines après qu'elle a compris (seule) qu'un deuxième bébé était en route. Et a presque magiquement réglé les crises que cette nouvelle avait fait naître. On se faisait juste un peu engueuler parce qu'on s'asseyait sur sa copine invisible. Cette première copine n'avait pas de nom, elle s'appelait "ma copine imaginaire". Un mois après, elle a été rejointe par un "copain imaginaire". Encore un mois après, il y a eu "David" (c'est le prénom d'un petit garçon qui avait été gardé avec elle quelques mois chez la nounou quand elle était toute bébé). Encore un mois après, Pikachu les a rejoints (je ne sais pas si Pikachu est un pokémon, ou un humain...).

Pendant un bon moment, elle est restée avec ces quatre là. David mourait régulièrement, et ressuscitait. La copine et le copain imaginaire avaient chacun un papa décédé (je me rappelle la première fois que le papa de la copine imaginaire est mort: le Moineau en sanglotait presque dans la rue. Top ambiance). La copine vivait avec nous, les autres rentraient chez eux le soir.

A l'entrée à l'école, les amis imaginaires se sont fait plus discrets. Moins besoin, sans doute, et puis les copains d'école fournissaient déjà bien suffisamment d'histoires et de questionnements. Après la naissance de l’Étourneau, un nouveau est apparu dans la bande: Mohamed (du nom d'un petit garçon qui dormait à côté d'elle au dortoir, mais qui n'était pas dans sa classe). David, lui, à ce moment, était définitivement mort. Mohamed est très vite devenu inséparable de Pikachu. Y avait d'ailleurs un truc marrant, dans cette paire, qui était reflétée par une paire de poupées: sa première poupée, qui s'appelait originellement "Poupée" s'est mise à s'appeler "Jeanne" (comme un personnage de Tchoupi), et une autre qui n'avait pas de nom s'est mise à s'appeler "Léa" (comme une petite fille de l'école qui souffle un peu le chaud et le froid, et change d'avis de minute en minute sur le degré d'amitié qu'elle entretient avec le Moineau). Donc y avait "Mohamed et Pikachu", et "Jeanne et Léa". A chaque fois, un personnage de fiction, et une personne réelle.

Au début du confinement, on en était là.

Et là, d'un coup... Elle s'est mise à intégrer à sa liste d'amis imaginaires TOUS les personnages féminins (et deux masculins) des films et dessins animés qu'elle voyait. Au rythme d'un film par semaine environ... Actuellement, si je ne me trompe, il y a:

  • Pikachu,
  • Mohammed,
  • Elsa,
  • Anna,
  • Vaiana,
  • Belle,
  • Chiita,
  • Satsuki,
  • Mei,
  • Kiki,
  • Heidi,
  • Peter,
  • Karl,
  • Teresa,
  • Clara.

Et puis Moriane et Mor-anne. Et la copine imaginaire, qui depuis quelque temps porte comme prénom le surnom du Moineau, au cas où on aurait pas pigé l'identification. (Plus de trace du copain anonyme, par contre). Comme elle éprouve le besoin d’égrener la liste toutes les trois phrases, je commence à bien les connaître. Ils sont princesses, sorcières, héros, enfants, adultes, morts ou vivants, mortels ou gentils.

Ils sont un peu multi-usages. Parfois, j'ai l'impression qu'il s'agit d'une petite armée, qui la protège, et que c'est pour ça qu'elle éprouve le besoin de les lister et de les compter. Ça les consolide, peut-être. Elle m'a demandé si elle pouvait les emmener dans son lit à la sieste, tout à l'heure.

Parfois, ce sont des frères et sœurs. Elle m'a expliqué tout à l'heure, que c'était super, d'avoir plein de frères et sœurs imaginaires, qui ne sont pas petits comme l’Étourneau. Alors je me dis que ça lui sert à ne pas être seule entre nous (elle nous informe de temps en temps que nous sommes les parents de tout ce beau monde, je suis un peu submergée).

Parfois, ce sont des substituts de copains de classe. Pendant que j'écris, par exemple, elle est en train de faire un cours de gym avec toute la bande. Elle les fait passer groupe par groupe, elle leur fait faire des exercices de yoga ("et je veux voir personne baisser les jambes pendant 15 minutes! Et après on se redresse tran-quil-lement"). Tout à l'heure, ils faisaient tous l'étoile de mer sur le tapis, j'ai dû leur faire de la place en poussant tout ce qui gênait. Parfois ils sont plus ancrés dans leurs fictions spécifiques, et elle rejoue avec eux les scènes les plus périlleuses des films.

Ça m'attriste, parfois, parce que je vois bien qu'ils sont une réponse à quelque chose de souffrant, qu'on ne parvient pas à soulager de notre côté. Qu'on ne peut sans doute pas soulager, en fait. Et en même temps, je trouve ça malin, comme solution. Elle est résiliente, ma fille, comme beaucoup de gamins. Ptet qu'on devrait tous en prendre de la graine.

(Je viens de lui dire à l'oreille "je t'aime". Elle m'a demandé de le dire à tous les autres. J'ai dit qu'elle pouvait leur dire de ma part. Elle a murmuré "je t'aime de la part de maman", avant de m'annoncer: ils sont tous collés à ma bouche, ils ont entendu!).

lundi 27 avril 2020

Peur(s)

  • J'ai peur que la colère ne déborde, et de taper sur ma fille.
  • J'ai peur de la renvoyer à l'école, et (un peu moins) peur de ne pas la renvoyer à l'école avant septembre.
  • J'ai peur de ne pas arriver à bosser suffisamment pour cette série de conférences que je suis censée faire en août. Et j'ai peur que ces conférences ne soient pas annulées.
  • J'ai peur d'être très angoissée par l'idée de sortir, même quand ce sera redevenu moins risqué
  • J'ai peur d'être reconfinée en été, qu'on soit coincés chez nous pendant les canicules, alors que la chambre des enfants est montée à 38 degrés l'an dernier.
  • J'ai peur de ne pas voir ma famille et mon neveu tout neuf (mon neuf-veu) avant des siècles.
  • J'ai peur que le Moineau ne puisse faire de fête d'anniversaire ni avec ses copains, ni avec ses grands-parents, alors qu'elle fantasme ces deux évènements depuis des mois.
  • J'ai peur d'être reconfinée à l'automne ou en hiver , dans la grisaille et la froidure, de ne pas pouvoir sortir de la maison trop sombre à cause du froid
  • J'ai peur pour mon père, agé, et pour ma sœur, qui sort d'une saleté de maladie qui l'a laissée épuisée.
  • J'ai peur pour mon département, très durement touché.
  • J'ai peur de tuer des gens si je sors.
  • J'ai peur de la crise économique qu'on va se taper dans les années qui viennent.
  • J'ai peur des répercussions politiques qui s'ensuivront.

Pas folichon, tout ça.

Edité le lendemain matin: les écoles ne rouvriront apparemment pas avant septembre dans ma ville, et ma série de conférences du mois d'août est reportée à l'an prochain. Déjà un peu moins d'incertitude, quelques heures après avoir posté cette note.