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lundi 18 octobre 2021

Visage, corps et âme

Envie d'écrire un truc sur mon corps ce soir.

Dans le cadre d'un projet de vulgarisation scientifique avec des enfants, on m'a demandé une photo de profil à mettre sur la page web, pour faire la comm' du projet. J'avais rien de récent sous la main, donc j'ai tenté à quelques reprises de prendre des photos de ma tête, avec des résultats pas toujours ravissants (comprendre: j'étais pas ravie de les voir).

Parce que je constate à quel point mon visage est fatigué. Depuis deux ans, je crois. Ou cinq. Ou 10, je ne sais pas. Un truc pas simple est de constater le vieillissement de mes traits. Pas tant parce que ça signifie que je vieillis. Je suis assez à l'aise avec cette idée, et je ne me trouvais souvent pas très jolie jeune non plus, de toute façon, y a rien de perdu de ce côté là. J'ai le visage d'une femme de mon âge, rien de tragique là dedans.

Ce qui est dérangeant, en revanche, c'est qu'il a pas mal changé en peu de temps. Et que j'ai parfois du mal à le reconnaître. J'ai vécu longtemps avec l'idée que je n'avais pas changé de tête depuis l'enfance, que quelqu'un m'ayant vue à 4 ans pouvait encore me reconnaître à 30. Je ne suis pas sûre que c'est encore vrai.

J'ai eu un moment comme ça, il y a quelques années, lorsque j'ai perdu 10 kilos en quelques mois, sans le vouloir du tout. C'était désespérant, pour moi, de perdre ce poids, alors que la seule chose que je souhaitais, c'était en prendre. Mon corps ne parvenait pas à conserver une grossesse plus de quelques semaines, et moi je fondais. Et j'ai vraiment eu une période un peu compliquée. Moi qui m'étais toujours vécue trop ronde, je trouvais insupportables ces creux dans mes clavicules et au niveau de mes genoux. Ou.. peut-être pas insupportables, mais irrémédiablement étrangers. Séparée de mon corps par cette incapacité à rester enceinte.

Quelqu'un m'a proposé de poser nue pour des photos à ce moment là, et j'ai oscillé, entre l'idée que ça me permettrait peut-être de me recomposer une image de mon corps, et l'impression que je ne pourrais rien donner de "vrai", tellement j'étais en guerre avec lui.

Et puis j'ai fini par l'avoir, mon deuxième bébé. Une grossesse un peu rude, beaucoup moins confortable que la première menée à terme. Trois derniers jours de contractions, interminables et douloureux. Et un accouchement qui est arrivé pour moi comme une réconciliation, avec mon bébé bastonneur et frondeur, et avec mon corps aussi, qui pour le coup, a fait ce que j'attendais de lui à la perfection.

La crise sanitaire est arrivée très vite après, dure pour tout le monde, physiquement, et psychologiquement. Mon fils vient d'avoir deux ans, et ça me paraît surréaliste.

Et donc là, d'un coup, je regarde mon visage sur l'écran, et il est le témoin parfaitement fidèle de ces dernières années, je crois. Marqué à la mesure de ce que j'ai encaissé. Et en même temps, ça me demande quand même un réajustement, parce qu'il n'est plus conforme à l'image de moi que je trimballais dans ma tête. Je le vois tous les jours dans le miroir, mais j'ai d'un coup l'impression de le (re)découvrir.

Alors même que j'ai complètement réintégré mon corps, pourtant lui aussi assez différent de ce qu'il était avant mes grossesses. J'imagine qu'il y a encore un palier, et qu'une fois qu'il sera passé, je serai repartie pour quelques années à connaître ma tête.

Mais en attendant, c'est qui cette dame, sur l'écran?

lundi 22 juin 2020

Retour en arrière?

Il y a certaines personnes sur Twitter avec qui je ne suis quasiment jamais en désaccord. Par exemple @Kozlika. Sauf aujourd'hui. Du coup, pour fêter ça, je me suis dit que j'allais développer dans une note.

Le premier tweet de Koz disait cela: périKozlika.png, juin 2020

Plus bas dans les réponses aux réactions que le tweet a provoqué, elle nuançait, et disait en gros avoir surtout du mal à comprendre pourquoi "notre" génération (je m'y reconnais en tout cas) accepte de se charger ainsi les barques "Charge mentale" "Douleur" "Temps" "Energie". Que ca lui semble un retour en arrière. Et que ça repose toujours sur les mêmes: les femmes.

J'entends assez bien tout ça, et je suis même d'accord avec elle sur certaines choses (notamment sur le déséquilibre entre hommes et femmes). Je crois que je ne mets pas tout dans le même panier (la question de la péridurale et l'allaitement, par exemple, sont des problématiques qui ont des points communs,mais pas tout en commun. Les petits pots et les couches lavables sont encore un truc différent pour moi.).

Pour dire d'où je parle: j'ai accouché sans péridurale, j'ai allaité ma fille jusqu'à 8 mois, et aimerais allaiter mon fils jusque vers 11 mois, 1 an (et oui, les nuits ne sont pas terribles). Ça nous est arrivé d'utiliser des couches lavables à certaines périodes bien spécifiques. J'ai préparé l'immense majorité des purées et compotes pour ma fille jusqu'à 1 an, et je fais pareil pour mon fils (il a un peu plus de compotes du commerce que sa sœur, je pense). Je précise aussi que j'ai un boulot qui me laisse relativement libre de mes horaires à plein de moments dans la semaine, normalement (c'est plus tendu d'habitude en ce moment, because la crise sanitaire).

Je crois que c'est pour ce qui concerne l'accouchement et la péridurale que je suis le moins en accord avec ce que disait Kozlika. D'abord parce qu'actuellement, y a environ 20% de femmes seulement qui accouchent sans péri, ce qui inclut toutes les femmes qui en voudraient mais ne peuvent pas en avoir, soit pour raisons médicales, soit parce qu'elles arrivent trop tard à la maternité (un deuxième ou troisième enfant qui arrive "trop vite", c'est courant). On est quand même loin de l'endoctrinement généralisé de la population sur la question.

Perso j'ai plutôt ressenti l'inverse. Il n'y a pas une personne à la maternité qui m'ait demandé SI je voulais une péri ou non. Tout le monde est toujours parti du principe que ce serait oui (c'était non, en fait, à la base, même si je ne m'interdisais pas de changer d'avis si l'accouchement durait trop longtemps, si je me sentais à bout, etc..).

Evidemment, il ne s'agit jamais entièrement d'un choix individuel, je sais pertinemment que je "coche" toutes les cases de la population type qui souhaite un accouchement "plus naturel". Ça n'en est pas moins pour autant un choix réfléchi. Je me vis comme une personne plutôt douillette, je n'aime pas la douleur, je fais en général ce que je peux pour l'éviter. Et en l'occurrence, j'ai eu envie d'essayer de faire sans péri, quand même, pour tout un tas de raisons. Si ca intéresse des gens, je peux redire ici ce que j'avais expliqué une fois sur twitter sur le "pourquoi" j'ai choisi de faire sans péridurale. Je ne le fais pas ici, parce que ça ne tient pas en trois lignes.

Pour résumer: l'accouchement avec péridurale me paraissait, les deux fois, beaucoup plus "subi" que l'accouchement sans. Je considère qu'accoucher sans péridurale m'a permis d'avoir deux accouchements rapides, sans trop de séquelles, pendant lesquels je me suis sentie en contrôle. Je me doute bien que plein de nanas auront un ressenti inverse: séquelles psychologiques d'avoir accouché sans péri, perte de contrôle, etc..

Pour moi, c'était plus confortable sans.

Et la douleur n'était pas, pour moi, insupportable. Deux heures après mon premier accouchement, j'étais littéralement prête à recommencer. Et pour mon second, mis à part les trois jours de contractions non efficaces (mais pas de possibilité d'avoir une péridurale de toute façon à ce moment là...), je garde un souvenir plus douloureux de mes hémorroïdes que de l'accouchement en lui même (oui désolée, j'ai dit un gros mot :D).

Alors évidemment, choix ou pas choix, influence ou pas influence de la famille, de la société, des médias, du lobby des sage-femmes au couteau entre les dents, c'est super dur à mesurer. Ce que je pense, moi, c'est qu'on a tou.te.s des représentations, des images, des idées. Et que les femmes qui accouchent avec péridurale ne sont pas moins influencées par tout un tas de trucs que les femmes qui accouchent sans. La question au final, c'est: est-ce que vous avez eu l'accouchement que vous vouliez? Est-ce que vous avez pu y prendre du plaisir, même un peu? Est-ce que vous en êtes satisfaite? Si oui, quelle importance ça peut avoir, que vous ayez été influencée dans un sens ou un autre?

Personnellement, je m'estime très très heureuse et chanceuse d'avoir eu, deux fois, des chouettes accouchements. Ca m'a plu. Et oui, même la douleur, parce que je l'ai vécue comme "utile", qu'elle m'a aidée à changer de position quand il fallait, etc.. Et oui, j'ai crié pour le premier accouchement, et non c'était pas très grave (même si ça a fait peur à mon amoureux, un peu, il en était nettement plus traumatisé que moi).

Et ça m'empêche pas de trouver très bien que d'autres femmes accouchent avec péridurale, si c'est leur choix. Ce qui me gave, par contre, c'est qu'on ne donne pas les clés aux femmes pour faire un choix éclairé. Et mon ressenti très subjectif et très partial, et très partiel, c'est que les femmes qui choisissent de faire "sans" sont en général mieux informées des conséquences (sur l'état de leur corps après l'accouchement, notamment) de leur choix que les femmes qui choisissent de faire "avec". C'est juste basé sur les femmes de mon entourage avec qui j'en ai parlé, c'est pas forcément représentatif, mais clairement j'ai des copines qui ont pas eu toutes les infos sur ce qui permet de préserver son périnée, par exemple.

Je pense que la seule option féministe est de dire que les femmes ont le droit de choisir comment elles accouchent, et de leur donner toutes les informations, les avantages et inconvénients de chaque méthode. Sans essayer de les effrayer ou de les endoctriner. Juste en les considérant comme des adultes qui peuvent décider de ce qui est le plus important, le moins douloureux pour elle, que ce soit physiquement ou psychologiquement. Avec évidemment la dimension supplémentaire qu'un accouchement se passe souvent différemment de ce qu'on avait prévu, et que parfois, on est obligée de renoncer à certains de ses choix pour des raisons médicales.

Je pense que je parlerai dans une autre note de l'allaitement, des ptits pots, des couches, etc., d'une part parce que ça fait super long comme note, déjà, et d'autre part parce que la problématique est différente: Ce n'est pas une questions d'heures, mais de semaines, de mois, d'années. Et la question de l'implication des pères (et deuxièmes mamans, mais soyons honnête, ça va pas poser les mêmes problèmes de répartitions des tâches, dans la majorité des cas) est beaucoup plus importante.