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mardi 4 juin 2024

1988-1989: Transition

J'ai cinq ans, et nous déménageons. Mon père a besoin de s'éloigner de Lyon, pour prendre un peu de distance avec l'Université, qui le bouffe littéralement. Je fais les cartons avec ma maman assise sur le carrelage de la cuisine, elle m'apprend à emballer les assiettes.

Le jour du déménagement (je crois), le mari de ma sœur meurt. Elle a 25 ans, et un bébé de trois mois.

De cet évènement tragique, je ne sais pas ce que je perçois à l'époque. Je sais, parce que ça a beaucoup été raconté, que mon petit frère l'a mal vécu. Je ne me souviens pas, moi, de ce que ça m'a fait, et il n'y en a pas trace dans l'histoire familiale.


Nous emménageons dans une maison de location dans le Beaujolais, pour un an seulement. De cette maison, je garde pas mal de souvenirs. La salle de bains où ma mère me coiffe. La salle de jeu. Notre chambre commune à mon frère et moi (la seule, dans tous les endroits où nous avons vécu ensemble). L'escalier, en bas duquel, très en colère sans doute, je déclare à ma mère "Quand j'aurai 11 ans, je changerai de maman".

Je me souviens des deux écoles (la maternelle déménage en cours d'année), de certains camarades de classe, de ma très chouette instit. Dans le spectacle de fin de l'année, on joue une saynète sur l'air de Malbrough s'en va-t-en guerre. Je joue l'épouse, et le gamin qui joue Malbrough est une espèce d'andouille qui me poursuit littéralement de ses assiduités dans la cour de récré. De ça, en revanche, je me souviens très bien: l'antipathie éprouvée pour ce garçon.

C'est con, la mémoire.


J'apprends à lire, aussi, avec mon papa. Les premiers livres que je me rappelle avoir lu avec lui ont pour héros "Oscar petit ours". Ils sont toujours chez mes parents, et je garde une grande tendresse pour eux. Je crois que mes premiers souvenir de lecture avec une lampe torche sous la couette date de cette année là, aussi..

vendredi 26 janvier 2024

26 janvier - Aujourd’hui numéro en couleur

"Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, Violette, Violette
Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, Vi-o-lette!"

Mon fils chante souvent cette chanson, et ça m'émeut, parce que c'est une chanson d'enfance de ma Maman.

mardi 9 janvier 2024

9 janvier - Aujourd'hui tentative de liberté

Je n'ai pas passé une très bonne journée, pour plein de raisons. Le boulot, le froid, la neige, mon corps fatigué et douloureux. Ma culpabilité d'avoir oublié de donner son goûter à ma fille pour l'étude, de rentrer tard et d'obliger mes enfants à rester plus de 10h à l'école aujourd'hui.

Le truc qui m'a le plus affectée, je crois, est un mail de mon père. Il avait prévu il y a quelques mois d'organiser une exposition rétrospective des œuvres de ma mère, pour célébrer ses 70 ans. Ça devait se passer dans un très beau lieu, une chapelle dans le Vercors. Il m'a écrit aujourd'hui qu'ils avaient décidé d'annuler, parce que l'organisation était en train de devenir un sujet massif d'angoisse pour eux deux, parce qu'ils vieillissent, qu'ils ont des problèmes de santé, chacun au moins une opération à venir dans les mois prochains, sans en connaître encore la date, etc. Je comprends très bien qu'ils renoncent, mais ça m'a fichu un coup au moral.

C'était un beau projet, cette expo, et ça me faisait envie. D'aider ma mère à choisir dans la multitude de ce qu'elle a créé depuis 40 ans. D'aller aider à l'accrochage. De voir la famille et les amis réunis autour d'elle et de tout ce qu'elle a fait de beau. Et leur vieillissement m'entame aussi beaucoup ces derniers jours. Le rétrécissement de la vie. La perte d'autonomie et de liberté. Pas juste physique, mais mentale. Mes parents ont passé toute leur vie de couple à se lancer ensemble dans des projets un peu fous, un peu démesurés, toujours un peu hors des clous, pour faire du beau, pour penser des choses, pour fabriquer du vivant. Je crois que sous cette forme-là, c'est terminé. Il en restera d'autres, moins ambitieuses, et pas moins intéressantes. Mais ils font, il me semble, en accéléré, le deuil de plein de choses qui étaient eux, et je me retrouve à le faire avec eux. Un peu à l'arrière plan, parce que ce n'est pas de moi qu'il s'agit, mais douloureusement, quand même, parce c'est une part importante et constitutive de mon histoire.

Il y a eu une tentative, une tension pour faire, organiser, créer du beau, encore une fois.
Et il faut reculer.
C'est la vie. Et c'est un peu nul, sur ce coup-là.